"Notre ami Jean-Claude Casanova a décidé de faire quelque chose de très utile : regrouper les écrits épars de Raymond Aron, en les classant par thème. C’est ainsi qu’il avait publié il y a quelques années un « Marx » de Raymond Aron, qu’Aron n’avait pourtant jamais conçu comme un livre. Il vient de faire la même chose à propos du général de Gaulle. Ces deux figures ont dominé ma jeunesse, il y a une gémellité entre ces deux destins tout à fait passionnante. Aron va à Londres au même moment que de Gaulle, il est totalement solidaire du combat des alliés, mais en décalage de la France Libre. Il se retrouve directeur de cabinet de Malraux, à la Libération. Il estime comme de Gaulle et au même moment qu’il faut en finir tôt ou tard avec l’Algérie, il a cette rupture très importante sur la guerre des six jours, mais en même temps on voit bien que sa démarche est très profondément différente de celle du général. Aron est un « classique », qui veut construire un ordre international, de Gaulle est un « baroque », qui chérit le mouvement, l’instabilité, le jeu, etc. Ce sont des esprits différents, mais deux personages qui ont vraiment dominé l’après-guerre en France. "