Poussière dans le vent

Brève proposée par Matthias Fekl dans l'émission Les primaires, machines à perdre? / Déroute à Kaboul: vers une défense européenne? / n°209 / 5 septembre 2021, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Poussière dans le vent

Matthias Fekl

"Je conseille le dernier roman de l’écrivain cubain Leonardo Padura, qui a déjà signé L’homme qui aimait les chiens, ainsi qu’un cycle de romans policiers qui permettent de comprendre le Cuba d’aujourd’hui. C’est un auteur extraordinaire, c’est également un homme très désabusé sur la situation de son pays, où il vit toujours, dans les quartiers populaires de La Havane. Dans ce roman, on touche un aspect qu’il n’avait pas encore exploité dans son oeuvre : les rapports entre les Cubains de Cuba et les Cubains exilés, en particulier à Miami. Comme toujours, on trouve une galerie de personnages aussi humains que finement décrits, ainsi que beaucoup de désillusions, d’humanité et de générosité."


Les autres brèves de l'émission :

13 novembre

Michaela Wiegel

"Alors que s’ouvre le procès des attentats du 13 novembre 2015, je voulais vous recommander un livre intitulé 13 novembre, résultat d’un programme à mon avis unique dans l’histoire mémorielle, à l’initiative (entre autres) du CNRS, qui regroupe un millier de témoignages étalés dans le temps. L’ouvrage est l’un des premiers résultats de ce travail sans précédent. Par rapport à la multitude de récits déjà existants, très prenants, ce travail offre un certain recul, avec un déroulé très précis. Le livre est très complet, et les bénéfices de la vente financent intégralement ce programme de recherche sur la mémoire."


Lake success

Lucile Schmid

"Je vous recommande ce roman de Gary Shteingart. L’auteur est américain, mais né en URSS en 1972, et arrivé aux USA à l’âge de sept ans. L’histoire se déroule pendant l’été 2016, juste avant l’élection de Donald Trump. Le héros est un multimillionnaire qui, à la suite d’une dispute conjugale, décide sur un coup de tête, en pleine nuit, de prendre un bus en direction du Nouveau-Mexique. Il va ainsi rencontrer l’Amérique qui va voter Trump, ce qui ne serait jamais produit sans ce voyage imprévu.Pendant ce temps, sa merveilleuse épouse new-yorkaise entame une liaison avec un écrivain qui pourrait bien être un double de l’auteur. Passionnant, et plein d’humour."


Mohican

Richard Werly

"Ce roman d’Eric Fottorino, qui vient de paraître, nous raconte l’histoire del a fracture génération elle de paysans dans le Jura, à propos des éoliennes. Outre son talent de conteur, Eric Fottorino a bien compris à quel point il existe aujourd’hui un lobby industriel de l’éolienne, qui remplace en quelque sorte celui qui a équipé les paysans de tracteurs énormes, de moissonneuses-batteuses toujours plus grandes, etc. Une génération de paysans qui a hier surinvesti dans la mécanique et la chimie se tourne aujourd’hui vers l’éolienne, perçue aujourd’hui comme un nouveau moyen de valoriser industriellement les terres agricoles, tandis que la génération nouvelle, sensible aux thèses écologistes et à l’agriculture biologique, y est réticente. C’est subtil, car on sait que les éoliennes sont une grande revendication écologiste, mais Fottorino nous montre que ce n’est pas forcément le cas pour les entreprises qu’il y a derrière. "


Miarka

Philippe Meyer

"C’est le portrait d’une jeune femme, à vrai dire encore une adolescente : elle a 19 ans quand elle entre dans la Résistance où elle est chargée de l’acheminement des faux papiers. Elle court de grands risques pendant deux ans, avant d’être arrêtée, torturée et envoyée à Ravensbrück puis à Mauthausen pendant que sa mère, son père, son frère Jean et ses sœurs Madeleine et Simone sont déportés dans le cadre de la solution finale. Denise Jacob – Miarka dans la Résistance- est la sœur de Simone Jacob, plus tard Simone Veil. Leur père, leur frère, leur mère mourront dans les camps. Miarka est le portrait d'une femme de beaucoup d’éclat physique et moral, issue d’une famille impressionnante par son attachement au savoir, aux livres, à la littérature, à la conversation, aux échanges, à l’impératif moral, à la recherche de la beauté et à la France. L’admiration qu’Antoine de Meaux voue à Miarka n’est pas béate, elle est tonifiante et contagieuse. Mais son livre est aussi un livre remarquable -et, quelquefois, terrible - par la clarté, la précision et la retenue qui en sont la marque. Pour moi qui ai signé avec Frédéric Rossif « De Nuremberg à Nuremberg », un documentaire sur le nazisme, la difficulté dans laquelle se sont trouvées les déportées parce que résistantes et les déportées parce que juives à partager leur destin n'a jamais été aussi claire, ni aussi prenante. La réflexion sur la transmission qui termine ce livre me touche au plus haut point."