L'Inde
Introduction
Jean-Luc Racine vous êtes directeur de recherche émérite au CNRS et chercheur senior au think thank Asia Center à Paris et vous avez dirigé de 1992 à 2001 le programme franco-indien de coopération en Sciences Sociales. Vous êtes également membre du conseil scientifique du Conseil Supérieur de la Formation et de la Recherche Stratégiques, (CSFRS) et membre émérite de centres de recherche indienne, pakistanaise et européenne. Vous siégez aujourd’hui à la revue Questions Internationales et au conseil éditorial des revues The India Review, et de Samaj. Vous avez également dirigé l’annuaire « Asie » de 2013 à 2016. Vous êtes aujourd’hui considéré comme un des plus grands spécialistes français de la géopolitique en Asie du Sud et notamment des dynamiques de transformation internes de l’Inde contemporaine et de son insertion dans le nouvel ordre mondial. Devenue indépendante en 1947 L’Inde est aujourd’hui une république parlementaire fédérale considérée comme la démocratie la plus peuplée du monde avec 17% de la population mondiale. C’est un foyer de civilisation parmi les plus anciens du monde considéré comme le berceau de quatre religions majeures : l’hindouisme, le jaïnisme, le bouddhisme et le sikhisme. Mais, le christianisme et l’islam s’y sont implanté depuis le 1er millénaire et y occupent une place importante. l’Inde est donc un pays très diversifié sur le plan religieux tout comme sur le plan linguistique et culturel. Bien que le pays soit toujours en proie à des conflits sur fond de religions ou de castes, son importante diaspora contribue à faire rayonner le soft power indien à travers le monde. Le pays a récemment été traversé par une vague de nationalisme notamment lors des derniers scrutins régionaux qui se sont tenus le mois dernier. Le BJP, parti nationaliste hindou auquel appartient l’actuel premier ministre Narendra Modi, a pris le contrôle de plus des 3/4 des États. Cette victoire n’a pas été obtenue sans heurts et sans ratés, comme dans l’état de Karnataka dans le sud du pays où le BJP a été accusé de corruption. Excellent communicant, le Premier ministre hindou Modi, élu en 2014, mène une politique teintée de nationalisme, lançant notamment en 2014 un programme de développement économique baptisé « Make in India » afin d’accélérer l’industrialisation du pays et la modernisation de son économie. Sur la scène internationale, l’enjeu pour l’Inde est de mieux s’insérer sur les marchés économiques mondiaux tout en s’inscrivant dans la lutte globale contre le terrorisme et le changement climatique. Premier importateur d’armes au monde, Delhi, souhaite renforcer son influence militaire, notamment dans l’océan indien, où la montée en puissance des pays asiatiques inquiète. Ce contexte tendu se reflète dans les tensions frontalières entre Chine et Inde le long des 6.000 kms de frontières que partagent les deux géants asiatiques mais aussi dans la guerre d’usure que le pays entretient avec le Pakistan au Cachemire. A l’intérieur, les défis de l’Inde sont nombreux puisque comparativement à sa population et à l’immensité de son territoire, le pays est pauvrement doté en ressources énergétiques. Le gouvernement a mis en place une politique de développement des énergies renouvelables et du nucléaire face aux défis environnementaux et à la pollution qui touche l’ensemble du pays. 30% des morts prématurées seraient dues à la pollution de l’air. Enfin, si la libéralisation économique lancée dans les années 90 a permis l’émergence d’une classe moyenne urbaine, la situation de nombre d’habitants, notamment dans les villes, reste précaire. A Bombay ville de plus de 20 millions d’habitants, 60% de la population vit dans des bidonvilles et seuls 20% a accès à l’eau courante. Alors que seuls 16% des villes ont accès à un système d’égout, ces impératifs sanitaires semblent d’autant plus importants que les villes pourraient être le foyer de développement de terribles épidémies telle que le virus Nipah dont un nombre croissant de cas a été recensé ce mois ci.