Caillebotte : peindre les hommes

Brève proposée par Philippe Meyer dans l'émission La santé mentale « grande cause nationale » / La Corée du Nord et l’Iran avec la Russie contre l’Ukraine / n°374 / 27 octobre 2024, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Caillebotte : peindre les hommes

Philippe Meyer

"La seconde est pour cette exposition, dont on peut dire qu’on ne la reverra sans doute jamais, parce qu’il y a une quantité considérable d’œuvres de Caillebotte (peintures, mais aussi dessins) venues de collections privées. Le travail nécessaire à réunir tout cela ne sera pas reproduit avant très longtemps, il ne faut donc surtout pas la rater. L’exposition est magnifique, très bien organisée, la diversité et l’originalité des tableaux donne une idée de la formidable originalité de ce peintre longtemps sous-estimé. D’après les jeunes gens qui gardent les salles, si l’on vient le matin (cela ouvre à 9h30 et là encore, il est possible de réserver) ou le soir d’ouverture hebdomadaire (le jeudi), c’est nettement moins fréquenté. Exceptionnel."


Les autres brèves de l'émission :

Les graines du figuier sauvage

Philippe Meyer

"Deux recommandations pour moi cette semaine, qui appuient deux manifestations culturelles qui fonctionnent déjà très bien. Si je les soutiens, c’est pour éviter que des auditeurs tentés de s’y rendre ne renoncent par crainte de ne pas trouver de place. La première est pour le film du réalisateur iranien Mohammad Rasoulof, d’une extrême finesse, qui donne à voir avec une formidable précision ce qu’est la situation quotidienne en Iran, et plus précisément celle des femmes. Toutes les séances sont pleines, mais il est désormais possible de réserver dans les cinémas, je vous encourage donc à le faire, car passer à côté de ce film par crainte de ne pouvoir entrer dans la salle serait vraiment dommage."


Figures du fou : Du Moyen Âge aux Romantiques

Lucile Schmid

"Je vous recommande moi aussi une exposition qui a commencé il y a peu, mais cette fois au Louvre. Évidemment, c’est notre sujet sur la santé mentale qui me l’a évoquée. Elle nous fait réaliser combien le fou est une figure à la fois symbolique et réelle, c’est chacun d’entre nous. De la cour du roi au carnaval en passant par le jeu d’échecs … On découvre ainsi que dans ce jeu (né en Inde), la figure commence par être un éléphant, puis un évêque (ce qu’il est toujours dans le jeu anglais), avant de devenir un fou. J’ai aussi découvert comment la période romantique est celle où l’on se réintéresse au fou, mais quand il est couronné : Charles VI, ou Jeanne de Castille, une figure que je ne connaissais pas du tout, à la biographie passionnante : décrétée folle parce qu’elle aimait trop son mari, et que son père désirait régner à sa place. Là encore, il y a de quoi méditer …"



Savonarole : l’arme de la parole

Nicolas Baverez

"Je vous signale aussi ce livre de Jean-Louis Fournel et Jean-Clause Zancarini, qui écrivent formidablement à quatre mains. Ils avaient déjà écrit un remarquable Machiavel, et ce livre en est une espèce de suite logique. Machiavel a participé au pouvoir après l’exécution de Savonarole en 1498. L’ouvrage est très intéressant, au cœur de la relation entre le politique et la religion, et de ce qui a amené à l’émergence de l‘État moderne en Europe."


Au soir d’Alexandrie

Nicole Gnesotto

"Je vous conseille ce roman égyptien, d’Alaa el-Aswani. L’écrivain est déjà l’auteur du formidable « L’immeuble Yacoubian », paru en 2002. L’action de celui-ci se situe à l’arrivée au pouvoir de Nasser, et c’est exactement la même contradiction entre une société civile ayant soif de liberté et un Etat policier qui se met en place. On voit comment le cosmopolitisme fait place petit à petit au nationalisme le plus étriqué, et c’est assez terrifiant, cela rappelle le Vienne de l’entre-deux-guerres : comment la culture ne sauve pas de la tyrannie."


Mesopotamia

François Bujon de L’Estang

"Je reste proche de la géopolitique avec ce livre d’Olivier Guez, qui avait déjà obtenu le prix Renaudot en 2017 pour son livre « La disparition de Josef Mengele », qui était remarquable. Ici, c’est un roman historique, ou de l’histoire romancée. Nous sommes au moment où l’empire ottoman est dépecé par la France et le Royaume-Uni, après la première guerre mondiale, et la création de ce qui est devenu l’Irak d’aujourd’hui. L’auteur construit son intrigue autour de figures hautes en couleur, et notamment Gertrude Bell, personnage romanesque à souhait : riche britannique, mi-archéologue, mi-agent secret. Une façon très plaisante de se plonger dans les origines du Moyen-Orient moderne."