"Je voulais citer le livre de Sophie Coignard, Le Nouveau Mal français. Sophie Coignard est une très bonne journaliste qui s’est lancée sur les traces d’Alain Peyrefitte, « parlez, écrivez, agissez » écrivait Alain Peyrefitte et elle le cite, et elle essaye de réactualiser le mal français d’Alain Peyrefitte. Je dois dire que j’ai lu avec beaucoup d’intérêt mais j’ai le même sentiment que j’avais quand j’ai lu le livre d’Alain Peyrefitte, c’est qu’au bout du compte il reste pour moi une énigme ce mal français. Car en réalité tous ces livres ont en commun de focaliser tout un ensemble de causes dont aucune ne me paraît en soi satisfaisante : l’incompétence des députés, la centralisation des hauts fonctionnaires, les corporatismes, un certain nombre de vices moraux du pays qui sont l’immobilisme, la défiance, l’égoïsme, des défauts idéologiques comme la manie réglementariste, je trouve que tout cela existe, tout cela est vrai mais tout cela ne nous permet pas, et ce n’est pas pour rien que l’on bégaye en France depuis tant de décennies sur les réformes à opérer, en dépit des livres extrêmement brillants, savants et énergiques de Nicolas, tout cela ne nous éclaire pas sur le levier, sur la façon dont il faut régler la chose. Nous sommes un vieux pays d’Etat, effectivement dominé par le sommet, et à mon avis ce n’est pas dans une révolution totale qu’on peut arriver à faire évoluer la chose, mais c’est dans un processus réformateur dont je continue à penser qu’il n’est pas étudié de façon raisonnable, précise, méthodique, réaliste, par l’ensemble de ceux qui nous dirigent, je ne parle pas seulement des hommes politiques, mais de l’ensemble des responsables sociaux, économiques, administratifs et politiques. Je trouve que d’abord nous ne sommes pas assez modestes et appliqués, à essayer de voir ce qui exactement ne marche pas, et cela nous donne donc une espèce d’accumulation de tous nos échecs, accumulation vertigineuse et désespérante."