Le grand écart

Brève proposée par Richard Werly dans l'émission La Libye au défi de la paix civile / L’ensauvagement des luttes sociales / n°125, que vous pouvez écouter ici. ou ci-dessous.

Le grand écart

Richard Werly

"Ma première suggestion est pour le livre de Pascal Perrineau, qui est un peu le pendant politique de l’archipel français. C’est tout à fait intéressant, il y a derrière ce livre un plaidoyer pour davantage démocratie directe. Je citerais cette phrase de l’introduction : « la disruption politique intervenue en 2017 a beaucoup contribué à délégitimer la représentation politique ancienne, sans parvenir à la renouveler. Cet échec a ouvert la voie à l’expression radicale de la contestation. »"


Les autres brèves de l'émission :

La liberté d’enseignement et les projets de loi de M. Jules Ferry

Jean-Louis Bourlanges

"Mon ami Stanislas de Laboulaye qui a exercé plusieurs postes diplomatiques importants, m’a signalé une oeuvre que j’aurais dû connaître depuis très longtemps, celle de son trisaïeul Edouard Laboulaye, un quasi contemporain de Tocqueville, qui a contribué à faire construire la statue de la liberté. Son livre montre que le monopole de la collation des grades par Jules Ferry, la nationalisation de l’université est une erreur profonde. Si l’université est si malade encore aujourd’hui, c’est à cause de ce mauvais choix (le seul je crois) de Jules Ferry. "


Giraudoux l’humanisme républicain à l’épreuve

Jean-Louis Bourlanges

"Je retombe en adolescence en recommandant deux livres, directement inspirés par des camarades de classe. Le premier est d’André Job, qui a consacré une grande partie de sa vie à l’étude de Giraudoux, il montre notamment quelque chose de tout à fait intéressant : l’auteur a été victime du fait d’être mort avant la libération, ce qui fait qu’on lui a accolé une image de désinvolture qui l’a écrasé, alors que toute son œuvre est en réalité empreinte d’une tension, d’une inquiétude et d’un tragique qui sont très forts. Ce livre réhabilite la place de Giraudoux dans l’Histoire, il n’a pas été le chantre précieux de la IIIème République qu’on a voulu faire de lui. "


Von Erbfeinden zu guten Nachbarn (Des ennemis héréditaires aux bons voisins)

Michaela Wiegel

"Je retourne aux barricades, à l’occasion des 150 ans de la guerre de 1870. Ce petit livre, bientôt publié par Fayard, de deux historiens Hélène Miard-Delacroix et Andreas Wirsching : Von Erbfeinden zu guten Nachbarn (Des ennemis héréditaires aux bons voisins). C’est un livre très instructif, il s’occupe des éléments qu’on a un peu oubliés, par exemple comment, après la guerre de 1870, il y eut une sorte de regard sur l’Allemagne, qu’on retrouve aujourd’hui (même s’il est déprimais vidé d’envies revanchardes), un mélange d’admiration et de détestation. Instructif donc, mais aussi amusant. J’aimerais raconter une blague par laquelle commence l’ouvrage, sur la famille Lagarde, renommée en 1871 en « Wache » (qui veut dire : « la garde »), écrit avec un « W » mais prononcé comme « vache ». Du coup, après la première guerre mondiale, cette famille est renommée « vache ». En 1940, on la renomme « Kuh », et en 1945, la prononciation change, on passe de « Cou » à « Cul » ... Réjouissons-nous donc que Christine Lagarde n’ait pas vécu en Alsace ... "


Rapport sur l’immigration

Béatrice Giblin

"Je voudrais attirer l’attention sur ce rapport sur l’immigration, qui a été remis au président de la République, dont le Monde a fait un compte-rendu, qui préconise davantage de régularisations pour les étrangers. Je pense qu’il est urgent que la France ait, vis à vis des étrangers qu’on ne peut pas expulser, parce que leurs enfants sont scolarisés en France, qu’ils sont salariés, et qui sont dans des situations invraisemblables, logés parfois deux ans d’affilée dans des hôtels (ce qui a un coût qui se chiffre en milliards d’euros), il est plus que temps qu’on regarde les choses sereinement. Il faut donner de la publicité à ce rapport, faire en sorte que le plus de Français possible examinent sereinement cette question. Voici plus de trente ans qu’on essaie de réduire une immigration dont on a besoin. Il ne s’agit pas d’être laxistes, mais d’avoir un minimum de dignité, que nous n’avons plus pour le moment."


La mouche

Philippe Meyer

"Christian Hecq et Valérie Lesort avaient déjà fait ensemble au Vieux-Colombier un « Vingt mille lieues sous les mers » absolument féérique. C’est exactement la même chose ici, avec une excellente maîtrise de tout ce que la technique peut apporter à un spectacle fantastique, avec tout ce que Valérie Lesort et Christian Hecq peuvent apporter d’humour, et une science du jeu que que les quatre comédiens partagent. J’y ai découvert à cette occasion un confrère visionnaire, celui qui s’est retrouvé en garde à vue pour avoir dit que le président de la République assistait à la réprésentation. J’étais dans la salle ce soir là. Cette garde à vue est une totale stupidité, en plus d’être un manquement aux règles tout à fait déplorable. Mais ce confrère est visionnaire en ce que, dans une déclaration ultérieure à sa garde à vue, il a dit qu’on lui avait confisqué son téléphone, parce que ce dernier contenait une vidéo montrant le président et son épouse s’enfuyant. Moi qui étais dans ce théâtre et avais le couple présidentiel parfaitement dans mon champ de vision, je les ai vus ne pas quitter le théâtre, applaudir aux saluts, et je sais qu’ils sont allés discuter avec les interprètes, même s’il y avait dehors l’attroupement que l’on sait. Par ailleurs, que des gens attendent le président de la République à la sortie d’un théâtre pour lui dire qu’ils ne l’aiment pas : rien à redire. Qu’en revanche ces gens entrent dans un théâtre et interrompent un spectacle, c’est vraiment montrer à l’égard du travail (celui des comédiens notamment) un mépris, à propos duquel on perd le droit de s’offusquer quand on prétend le ressentir soi-même."