Les brèves

Théodoros

Richard Werly, créée le 22-09-2024

"Je suis en train de finir ce roman de Mircera Cartarescu, et je vous le recommande vivement. Je ne connaissais pas cet écrivain, il est professeur de littérature à Bucarest. Théodoros II était un roi d’Ethiopie, qui s’est suicidé dans son palais assiégé par l’armée britannique à l’époque de la reine Victoria. C’est absolument passionnant : une prose flamboyante qui m’a rappelé celle de Garcia Marquez. Je pense qu’il s’agit d’une œuvre majeure."


Sortir du travail qui ne paie plus : compromis pour une société du travail au XXIème siècle

Philippe Meyer, créée le 15-09-2024

"Je voudrais signaler le livre d’Antoine Foucher, « Sortir du travail qui ne paie plus », aux éditions de l’Aube. L’auteur constate que, pendant les 30 glorieuses, le niveau de vie a augmenté de 5% par an, ce qui permettait de le doubler en 15 ans. Aujourd'hui, il augmente de 0,8% par an, autrement dit, il faut travailler 84 ans pour vivre deux fois mieux. Le mouvement qui voulait que l'on vive de mieux en mieux en travaillant de moins en moins grâce à un travail de plus en plus productif s’est arrêté. Les travailleurs actuels doivent travailler davantage que leurs parents sans avoir l'espérance de vivre mieux qu'eux. Il nous faut réindustrialiser, investir dans l'éducation, dans les compétences et dans l'innovation alors que nous surinvestissons dans les retraites et la protection sociale. Ne plus faire reposer sur les travailleurs l'essentiel de la fiscalité, car nous taxons le travail 8 fois plus que l'héritage, 3 fois plus que les retraites, une fois et demie plus que la rente. Il faut remettre à plat la fiscalité, soulager le travail de 100 milliards d'euros, taxer les 10% des héritages des plus élevés et les retraites les plus substantielles. Il faut créer une TVA de souveraineté, par exemple sur les biens intensifs en carbone importé comme les voitures produites en Asie, qui serait soumise à une TVA de 25%. La moindre originalité de ce livre n'est pas de proposer pour cette remise à plat de la fiscalité un référendum qui définirait un nouveau contrat social fondé sur le travail."



La grande illusion : journal secret du Brexit (2016-2020)

Michaela Wiegel, créée le 15-09-2024

"En attendant le gouvernement, on peut s’intéresser à la pensée de Michel Barnier, et il se trouve qu’il avait publié son journal de la période du Brexit, et il vient d’être publié en livre de poche. Le livre nous apprend tout de même des choses utiles pour la situation d’aujourd’hui, par exemple ce qu’il pense de Mme Le Pen. Et puis, en fil rouge, on retrouve en France les mêmes angoisses qui ont touché le peuple britannique. On aura donc les mêmes populistes si l’on n’y prend pas garde. "





Houris

Béatrice Giblin, créée le 08-09-2024

"Je vous recommande le dernier roman de Kamel Daoud. L’auteur est désormais exilé en France, puisqu’il est interdit d’aborder un certain nombre de sujets en Algérie, dont celui de la guerre civile et des années de plomb, dont parle ce livre. Le roman n’est pas parfait, certains trouvent son style très poétique, pour ma part je le trouve un peu alambiqué. Le livre me paraît pourtant nécessaire, c’est un combat contre l’oubli, car toute nation qui met ses tragédies sous le tapis sera rattrapé par elles un jour ou l’autre. "


Houris

Nicolas Baverez, créée le 08-09-2024

"Nous ne nous étions pas concertés pour ces brèves, et j’avais moi aussi prévu de vous recommander le livre de Kamel Daoud. Sa lecture tombe d’autant plus à pic que les élections présidentielles ont lieu ce week-end an Algérie (même si leur résultat ne fait malheureusement pas l’ombre d’un doute). Aujourd’hui en Algérie, la guerre civile qui pèse sur le destin et dans les consciences de la population, c’est bien la guerre civile des années 1990, alors que le pouvoir algérien continue à fonder sa légitimité et à ne parler que de la guerre d’indépendance. « Meursault contre-enquête » était tout à fait magistral, il est vrai que ce roman-ci est plus touffu, mais il éclaire la guerre civile de façon absolument nécessaire. "


Pompes funèbres : les morts illustres 1871-1914

Philippe Meyer, créée le 08-09-2024

"Je voudrais signaler le dernier livre de Michel Winock, Pompes funèbres. S'appuyant sur Michelet qui définissait l'Histoire comme une résurrection, Winock à travers le récit de la mort et des funérailles d'une vingtaine de personnages capitaux, donne à voir l’essentiel de leur vie, et propose une histoire cursive et alerte de la IIIème République. On y trouvera des visites à de grands écrivains : Hugo. Zola, Jules Vallès, Péguy, tous mêlés à la vie politique de leur temps, de grands intellectuels, Michelet, (enterré trois fois),  Renan, Pasteur, des acteurs capitaux des nombreux combats de l’époque, Gambetta, Thiers, Jaurès, des méconnus comme Sadi Carnot et des défavorablement connus comme Félix Faure, d’admirables oubliés, comme Louis Rossel, le patriote intransigeant, des féministes, révolutionnaire, comme Louise Michel, réformatrice, comme George Sand, hésitante, comme Louise Colet. « Je ne propose pas ici une haie d'honneur, écrit Winock je retrace à grands traits l'existence d'une vingtaine de personnalités qui ont compté dans notre histoire, sans brûler l'encens et sans agiter le fouet. Je ne cache pas pour autant mes sympathies et, plus rarement, mes répulsions. Car ces morts vivent en moi, même si je ne veux pas me laisser prendre au mirage du passé ». Ce tranquille mélange d’érudition et de conviction est la marque du biographe, de Clémenceau, de Flaubert et de Madame de Staël …"


Récits de certains faits

Marc-Olivier Padis, créée le 08-09-2024

"Pour cette rentrée littéraire, ma curiosité m’a attiré vers cet ouvrage de Yasmina Reza. Les « faits » du titre sont de deux natures différentes. D’une part, l’auteure a suivi beaucoup d’audiences de procès d’assises, et d’autre part, elle raconte des évènements de la vie quotidienne, des rencontres, des dialogues, de petits morceaux de vie. La juxtaposition est réussie, j’ai trouvé le livre très fort. Quand elle parle des procès, il ne s’agit pas de compte-rendus d’audience, pour relier le contenu des audiences à des phénomènes sociétaux, mais au contraire l’auteure affirme tranquillement un discours personnel et littéraire, face au discours judiciaire. Ce faisant, elle montre à quel pont un point de vue subjectif peut changer les perspectives, en parallèle du récit construit par l’institution judiciaire. "