Les brèves

Coup de gueule

Jean-Louis Bourlanges, créée le 14-07-2024

"J’ai été très frappé de l’absence absolument totale des réalités internationales dans les dernières semaines. Or c’est quelque chose de tout à fait déterminant pour nos politiques … Rien sur l’Europe, rien sur l’Ukraine (même chez LCI), rien sur Gaza … Or on voit à quel point l’Histoire est en train d’avancer de façon terrifiante : avec ce qui se passe en Afrique de l’Ouest, avec les bombardments d’hôpitaux à Gaza et à Kyiv, avec l’évolution assez tragique de la candidature démocrate aux Etats-Unis … Tout cela constitue quelque chose de beaucoup plus important que tout ce qui alimente la querelle intérieure française."


Le lièvre aux yeux d’ambre

Nicole Gnesotto, créée le 14-07-2024

"La deuxième saga est celle de la famille Ephrussi, par Edmund De Waal. Charles Ephrussi était l’un des modèles du Swann de Proust. Mais le livre est surtout l’histoire de cette grande famille juive richissime, originaire d’Odessa, et exportatrice de céréales, installée à Paris et à Vienne, et qui a investi dans l’art. Une famille dont il ne reste malheureusement personne aujourd’hui. Seul vestige, à part la villa Ephrussi : une petite collection de miniatures japonaises, dont l’une a donné son titre à l’ouvrage. "



La splendeur des Brunhoff

Nicole Gnesotto, créée le 14-07-2024

"L’été, j’adore les sagas, et je regarde moi aussi avec beaucoup de plaisir The Durrells sur Arte. Je vous recommande deux livres. Le premier, signé d’Yseult Williams, nous raconte l’histoire exceptionnelle de cette famille absolument géniale. On connaît tous Jean de Brunhoff, le créateur de Babar, mais les quatre enfants ont été des créateurs exceptionnels, dans l’art, dans la mode, dans l’écriture, le dessin ou la musique. C’est l’archétype de la grande bourgeoisie française du début du XXème siècle, extrêmement cultivée, éprise de modernité, patriote … Passionnant."


Paris libéré, Paris retrouvé : 1944-1949

Richard Werly, créée le 14-07-2024

"Cet autre livre ne sera publié que le 21 août, il est signé d’Antony Beevor et Artemis Cooper. Ce qui est passionnant dans cette histoire de Paris occupé, libéré et après-guerre, est qu’elle est racontée par deux Britanniques. Antony Cooper est le petit-fils de Duff Cooper, ambassadeur britannique à Paris entre 1944 et 1947. C’est passionnant, cela regarde la scène culturelle, policière, judiciaire, politique … La distance qu’on a par rapport à l’époque nous permet de quelquefois juger les Français drôles, tristes, tragiques, et passionnants à la fois. Un vrai plaisir de lecture. "


L’orientalisme en train de se faire

Akram Belkaïd, créée le 14-07-2024

"Le cœur de ce livre, qui est un ouvrage collectif, est l’archive. Et surtout l’archive personnelle, de René Basset, qui a créé l’école d’Alger. Professeur d’arabe et de berbère entre 1880 et 1924 à la faculté de lettres d’Alger, dont il fut aussi le doyen. Il faut rappeler qu’Alger était la seule ville de l’empire colonial français à avoir une université, devenue par la suite un centre indépendant d’études et de recherches sur la langue, sur les dialectes et les cultures du monde arabe. Le livre est passionnant car il montre comment une science se constitue, comment Basset organise la recherche de manuscrits depuis son bureau, comment naît cet orientalisme de terrain, distinct de l’orientalisme parisien, comment il s’entremêle avec la démarche coloniale. L’archive personnelle de René Basset comporte 50 000 lettres, sur lesquelles les auteurs de ce livre ont travaillé. Ce chiffre donne le vertige. Qu’en sera-t-il dans 50 ou 100 ans, alors que nos correspondances sont désormais toutes numériques ?"


Dictionnaire des étrangers qui ont fait la France

Matthias Fekl, créée le 05-07-2024

"Puisqu’il est à la mode de faire des listes de binationaux et de Français d’origine étrangère, je conseille un livre paru il y a une dizaine d’années sous la direction de Pascal Ory, qui nous rappelle tout ce que notre pays doit à des étrangers. Certains sont devenus Français, d’autres pas, et que ce soit dans les sciences, les arts, la littérature, la chanson, ils sont partout. Même Astérix est né de deux pères d’origine étrangère ! Marie Curie, Joséphine Baker, Picasso, Le Corbusier, Zola, Beckett, Gary, Aznavour, Pierre Cardin, Goscinny, Uderzo … N’oublions pas tout ce qu’on leur doit."


Neuf mois : récit

Philippe Meyer, créée le 05-07-2024

"Je n’ai pas dû manquer beaucoup d’articles de Philippe Garnier, ce journaliste qui parlait beaucoup de cinéma et éventuellement de rock n’roll, ni ses traductions, de John Fante ou Bukowski. Et si j’en avais manqué, Bertrand Tavernier (qui l’aimait beaucoup) me l’aurait signalé … Il vient de publier un livre aux éditions de l’Olivier, qui s’intitule Neuf mois, c’est-à-dire le temps qui a séparé le diagnostic du cancer de l’estomac de sa femme Elizabeth, de sa mort. Un livre dans lequel il faut entrer très poliment, et dont on sort avec le besoin d’un long moment de silence. Je le commenterai avec trois citations. La première est de Philippe Garnier lui-même : « j’écris ce livre non pour me faire pardonner, ni pour la faire revivre, mais plutôt comme un tribut à la femme dont j’ai toujours cru tout savoir, et qui m’a surpris jusqu’au bout ». La deuxième est d’Henri Calet : « ne me secouez pas, je suis plein de larmes » ; et la dernière de Jean-Loup Dabadie, qui fait dire à Jean Rochefort dans « Nous irons tous au paradis » : « vous qui pénétrez dans mon cœur, ne faites pas attention au désordre »."


Minuit moins dix à l’horloge de Poutine

Marc-Olivier Padis, créée le 05-07-2024

"J’en reviens à des sujets politiques, et au climat de violence latente que l’on peut ressentir. On pointe souvent la responsabilité des médias et des réseaux sociaux, mais il faut comprendre qu’il ne s’agit pas d’un phénomène advenant mécaniquement, mais qu’il y a des acteurs qui cherchent à amplifier les tensions au sein de la société française. Nous ne sommes certes pas en guerre contre la Russie, mais pour autant, celle-ci a bel et bien lancé une guerre informationnelle contre la France. On en a des preuves tous les jours. David Chavalarias est chercheur, mathématicien et spécialiste des réseaux. Il a un site internet, Politoscope, que je vous recommande d’aller voir. Il travaille sur la manière dont l’amplification des violences verbales et des opinions extrêmes est opérée par des agents. Il a écrit un livre (Toxic data) et sur son site, il a fait une note plus directement liée aux élections européennes, dans laquelle il décrit très bien le fonctionnement de diffusion et d’amplification de fausses informations et d’opinions extrêmes, qui n’ont pour but qu’échauffer les esprits. On se souvient par exemple de deux expéditions de pieds nickelés russes, pour peindre sur les murs de Paris des étoiles de David, ou des mains rouges sur le Mémorial de la Shoah. Tout cela est fabriqué. Aujourd’hui, le fait de garder notre sang-froid, de résister aux extrêmes, et de comprendre pourquoi la démocratie a besoin de modération est une tâche se salubrité publique."


Conseil à nos auditeurs

Jean-Louis Bourlanges, créée le 05-07-2024

"Je suis un peu embarrassé, car je n’ai pas préparé de brève. Je me contenterai donc d’un conseil : lisez les journaux, et soyez particulièrement attentifs aux programmes, aux absences de programmes, aux esquives. Abordez ce scrutin de dimanche avec le minimum de préjugés et d’idées vagues, et le maximum d’informations sur ce que veut et ce que craint chacun des partis en présence, et surtout, ce qu’ils dissimulent. Car en réalité, ils se caractérisent moins par ce qu’ils disent que par ce qu’ils cachent."


Six pieds sur terre

Isabelle de Gaulmyn, créée le 30-06-2024

"Ce film de Karim Bensalah nous raconte l’histoire de Sofiane, jeune homme d’origine algérienne, qui vit en France, y fait beaucoup la fête, et reçoit soudain une Obligation de Quitter le Territoire Français, car il ne passe pas ses examens universitaires. Pour pouvoir rester en France, il va travailler dans une entreprise de pompes funèbres musulmane. Le film est très intéressant, et la façon dont l’islam s’occupe du corps des défunts est filmé de façon très belle. A travers ce soin aux défunts, le jeune homme va retrouver une forme d’ancrage dans la société, que sa double identité avait un peu dissipé. Un film qui donne à réfléchir sur la religion, l’identité, la culture, autant de sujets complexes auxquels est confrontée toute une jeunesse."